Le "Patriotisme économique" à l'Italienne: suite et fin.

Le projet de fusion entre le gestionnaire d'autoroute italien Autostrade, appartenant à la famille Benetton, et son homologue espagnol, Abertis devait créer un grand groupe dans ce secteur économique mais avait un défaut rédhibitoire aux yeux des Italiens: il devait avoir son siège à Barcelone et avoir un leadership espagnol. D'où de fortes réactions en Italie à ce mariage qui reflétaient un "patriotisme économique" de même nature que celui dont notre Premier Ministre s'est fait le chantre à plusieurs reprises. Une clause dans la loi de privatisation des autoroutes( à des sociétés italiennes, bien sur) et une autre sur l'incompatibilité entre le metier de gestionnaire d'autoroute et l'activité de Travaux Publics permettait d'arréter le projet de fusion pour un temps; Car, bien sur, ce genre de clause protectionniste n'est pas acceptable à Bruxelles

Et comme Romano Prodi, nouveau Premier Ministre italien, venait juste de quitter la direction de la Commission, il lui était évidemment quasi impossible de prendre un position " à la De Villepin" sur ce sujet. Il a donc publiquement promis de lever les obstacles et jusqu'à ces derniers jours donnait l'impression de l'avoir fait, officiellement tout au moins.

Et pourtant le mariage ne se fera pas,les futurs époux en ont décidé ainsi mais en se plaignant de la mauvaise volonté des autorités italiennes et en particulier du Ministre des Transports et de son Directeur de routes dont l'autorisation finale n'était toujours pas arrivée.

Autre pays, autres méthodes. En France, nos plus hautes autorités sont montées immédiatement au créneau et se sont attirés de ce fait les accusations d'esprit gaulois( le fameux gallic spirit) ou d'un attitude facilement hautaine vis à vis des autres.

En Italie, sans connaitre la méthode employée, elle a été visiblement efficace et très habile. Un mélange de Combinazione et d'autolimitation des acteurs peut être, avec un lampiste - le Ministre des Transports ou le Directeur des routes- pour endosser la responsabilité officielle. Bien joué Monsieur Prodi.

A signaler qu'Abertis a pu prendre une participation sans problème dans les autoroutes françaises lors de la dernière campagne de privatisation. Nous nous sommes donc révélé dans ce cas comme beaucoup moins "patriote économique" que nos amis ialiens alors qu'au yeux du monde nous sommes les créateurs du concept...

Une chose est sure, le "patriotisme économique" est une notion presqu'aussi répandue en Europe qu'il n'y a de pays dans l'union. A une exception prêt, la Grande Bretagne qui regarde impavide les achats ventes de sociétés britannique sans jamais intervenir.