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CaDerange
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29 octobre 2006

Biocarburants: tentative de bilan chiffré...

Mes différents articles sur le sujet de biocarburants des 21, 23, 25 et 27 octobre montrent bien que la possibilité technique de les fabriquer existe d'ores et déjà aussi bien pour les moteurs à essence que pour les moteurs diesel, que la solution la plus simple pour les utiliser, le melange avec les carburants d'origine petrolière existants, n'est probablement pas celle que les pouvoirs publics, en France, vont favoriser et que de très nombreuses recherches de par le monde se font en ce moment pour améliorer cette filière avec un objectifs de résultats significatifs à 10/15ans.

La faisabilité technique étant demontrée, il faut s'intéresser aussi à savoir à quel cout ces biocarburants pourront être produit,avec quel bilan environnemental et quels seront les volumes globaux qui pourront en être produit.

  • Du point de vue des prix de vente qui sont la réference du client final (et des medias!), rappellons tout d'abord que le prix à la pompe est une notion tout à fait artificielle du fait du pourcentage de taxes qui le constitue(55 à 65 pct environ suivant les produits). On sait que pour en permettre l'inclusion en mélange dans le super et le gazole, l'Etat a autorisé  en 2006 des diminutions de taxe sur l'éthanol et le diester de respectivement 33 et 25 cts d'euros par rapport à un prix moyen à la pompe de 1.24 et 1.08 euros pour super et gazole.
    Prix du Super  :  0.44(cout du produitHT) + 0.59(TIPP) + 0.21(TVA) = 1.24
    Prix du Gazole:  0.49                             +0.42            +0.18         = 1.08
    Pour rendre plus parlant cet effort fiscal considérable, ça voudrait dire que pour conserver des recettes fiscales constantes, il faudrait donc monter le prix à la pompe d'un super et d'un gazole à 100pct bio à 1.58 et 1.25 euros le litre.Ou encore à prix de vente identique de réduire les taxes de TIPP+TVA sur l'essence de 0.81 à 0.48 et sur le gazole de 0.60 à 0.45.
    Dans le cas de l'autre possibilité qui est de lancer le E85 en France, on parle d'en fixer le prix et donc le niveau de taxe à 0.85 euros ce qui sous entend que les recettes fiscales de l'Etat sur ce produit seraient quasiment réduites à la seule TVA soit environ 0.20 cts d'euros .
    L'effort total en 2006 pour l'inclusion des biocarburants dans l'essence et le gazole a été de 325 millions d'Euros. Il serait encore plus considérable pour l'E 85 à ce prix. Il faudra donc que l'Etat récupère ailleurs cette perte de recettes fiscales.
    A noter que l'argumentaire de la profession agricole est que le développement de cette filière industrielle crééra ou maintiendra dans la profession et pour les usines de fermentation/distillation environ 4500 emplois pour l'éthanol et 14500 pour le diester soit 6 emplois à la tonne( chiffres Price Waterhouse Cooper).
  • Sur le plan environnemental, le bilan est sans aucun doute positif mais plus mitigé que l'on veut bien nous le faire croire. Tout d'abord parce qu'on prend en compte dans l'économie d'emissions de CO2 le bilan dit "du puit à la roue", c'est à dire qu'il prend en compte comme un gain dans le calcul global de ces émissions le CO2 absorbé par la plante pour pousser alors qu'il ne prend pas en compte celui absorbé il y a des millenaires pour produire le pétrole,- également d'origine végétale-, et piégé depuis lors dans les gisements pétroliers au fond de la terre ou des océans. En d'autres termes le petrole est considéré "relarguer" du CO2 séquestré alors que pour les biocarburants, du fait qu'ils poussent et sont consommés la même année,on considère que le bilan global est seulement de la différence entre CO2 absorbé et émis.La réalité en terme d'émission de CO2 pure, lors du fonctionnement du moteur, est que les émissions de CO2 à partir d'essence et de gazole ou de biocarburants sont très semblables.
    Le raisonnement du calcul des emissions du puit à la roue est néammoins tout à fait exact si les biocarburants proviennent de surfaces en jachères qui de ce fait deviendraient utilisés et absorberaient du CO2 atmosphérique.
    Un autre élement dont on nous parle peu est la consommation d'énergie pour les produire ( alimentation des tracteurs, fermentation et distillation, puis mise à la consommation) qui est loin d'être négligeable mais surtout celles des intrants comme on les appelle, c'est  dire des engrais, pesticides et surtout de l'eau. Les oléagineux sont particulièrement gourmands de ce point de vue et rendent nécessaire de laisser reposer la terre un an sur trois.
  • Du point de vue des surfaces disponibles pour ce nouveau type de culture,il est tout à fait possible de les trouver pour remplir les objectifs que le gouvernement s'est donné jusqu'en 2010/2012 en recultivant des terres en jachères et en récupérant des surfaces précédemment consacrées à la betterave sucrière et que la condamnation des pratiques de subvention de la France par l'OMC, vient de rendre disponibles. Au dela de 2012 la situation deviendra plus tendu pour la production des esters d'oléagineux. Le maximum de taux d'incorporation de biocarburants estimé atteignable avec les surfaces agricoles disponibles est estimé à 20/25 pct ce qui devrait permettre de fournir la demande jusqu'én 2°015/2020. En aucun cas par contre nous ne pourrons nous passer des 50 millions de tonnes de pétrole qui necessiteraient pour en produire l'équivalent en biocarburants, 3 à 4 fois la surface agricole utile (SAU) de la France entière !
    En d'autres termes les biocarburants permettront simplement de répondre à l'accroissement de la demande d'içi 2020 et de mordre un peu sur les importations de pétrole.
    D'içi là, d'autres phénomènes viendront interférer avec cette montée des cultures à biocarburants.Certains positifs comme l'amélioration des rendements liés aux résultats des recherches conduites en Phase II et Phase III . D'autres négatifs comme l'accroissement des besoins alimentaires mondiaux pour nourrir les 3 milliards d'hommes supplémentaires sur terre d'içi 2050. Dès 2015 il faudra parfois chosir entre différentes cultures, sucre pour la nourriture humaine et éthanol pour le transport,par exemple. La hausse des prix de certains produits agricoles à laquelle nous assistons pour le sucre et le blé pourront aussi affecter l'équilibre des surfaces cultivées entre cultures vivrières et cultures énergétiques.

En conclusion, les biocarburants sont effectivement une opportunité à développer, surtout pour un pays agricole comme le notre. Ce n'est pas néanmoins la panacée qui resoudra tous les problèmes énergétiques du transport individuel et professionnel. Ils sont en quelque sorte l'équivalent de ce qu'est l'éolien à la production d'électricité, un appoint bienvenu mais qui ne sera pas capable de résoudre l'énormité du problème auquel nous sommes confrontés.                

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